Pour répondre à cette question, il faut d’abord comprendre le contexte culturel et musical de la Nouvelle-Orléans, berceau du jazz au début du XXe siècle. Fruit d’un métissage entre les traditions africaines, européennes et créoles, le jazz prenait ses racines dans des styles variés : les chants de travail des esclaves, le blues rural, le ragtime, sans oublier les fanfares et les musiques européennes plus classiques.
En Afrique, la tradition musicale reposait largement sur des pratiques collectives et orales où l’improvisation occupait une place prépondérante. Les musiques traditionnelles africaines intégraient des variations spontanées sur une base rythmique répétitive, ce qui influencera profondément les formes naissantes du jazz. Cependant, le jazz n’est pas une reproduction directe de ces traditions : dans un pays marqué par la colonisation culturelle européenne, il a été également influencé par des genres structurés comme les marches militaires ou les danses de salon.
Lorsque le jazz voit le jour, des ensembles comme ceux de King Oliver ou Jelly Roll Morton combinent des éléments écrits avec des passages d’improvisation collective, souvent en utilisant des choruses (cycles d’accords répétés). Cette approche hybride reflète un équilibre entre la spontanéité et une organisation préétablie. Morton lui-même, célèbre pianiste et compositeur, insistait dans ses écrits et ses enregistrements que “l’improvisation dans le jazz fonctionnait mieux lorsqu’elle restait encadrée par des règles”. Une nuance qui mérite d’être soulignée.