Faut-il voir, dans l’éclat new-yorkais, le dernier feu d’un modèle centré sur la métropole, alors que l’innovation jazz se disperse, des favelas de São Paulo à Séoul, d’Istanbul à Johannesburg ? Sans doute, New York ne détient plus le monopole : la “world city” laisse circuler talents, samples et influences à la vitesse des câbles sous-marins.
Reste une réalité : pour se tester, s’immerger, confronter les langages, New York demeure le terrain de jeu ultime. Non pas parce qu’il faudrait y reproduire ce qui a été fait – au contraire, la scène new-yorkaise ne pardonne pas le mimétisme –, mais parce qu’y tenter sa chance, c’est se frotter à la contradiction, à la friction de la différence, à l’ébullition de l’instant. À entendre les musiciens eux-mêmes, la ville agit comme un accélérateur : on ne vient pas y rechercher la consécration, mais l’inattendu.
Voilà pourquoi New York, à l’heure des plateformes et de la globalisation, demeure ce laboratoire traversé de risques et d’errements magnifiques. Tant qu’il y aura des musiciens capables de s’y perdre, de s’y cogner, et de s’y réinventer, il y aura là un centre nerval pour le jazz.