Impossible de disséquer le jazz moderne sans souligner cette avidité, cette incapacité à rester sage – et c’est bien là sa puissance. Là où d’autres formes musicales se contentent de s’auto-citer ou de recycler, le jazz préfère tendre des pièges, jouer la carte de l’inattendu, chercher le dialogue là où tout semble dissonant. Les scènes actuelles – qu’on parle de Lower East Side à Manhattan, de Soweto, de Tokyo ou de Lyon – n’ont presque plus rien à voir avec l’image figée d’un musicien studieux penché sur ses gammes.
Le jazz moderne ne s’inspire pas seulement de son héritage foisonnant ; il l’explose, l’hybride, l’enrichit. Il dessine les contours d’un langage ouvert, collectif, généreux – effrontément vivant. Face aux conservatismes, il rappelle que la seule tradition qui vaille, dans ce chaudron sonore, c’est celle du mouvement perpétuel.
Et si l’innovation musicale, au fond, n’était qu’une autre manière de rester disponible à la surprise ? Le jazz, dans ses replis les plus aventureux, reste un territoire qui charrie toutes les identités, toutes les audaces. Une machine à tomber les murs, pour déjouer les habitudes – et pour continuer, malgré tout, à écouter autrement.