Le grand tournant pour le jazz en France intervient dans les années 1980, une décennie où la politique culturelle de l’État atteint son apogée. La création du ministère de la Culture en 1959 (sous l'égide d'André Malraux) et ses prolongements sous Jack Lang offrent un tremplin à des formes artistiques encore peu reconnues. Le jazz en profite.
L’établissement des SMAC (Scènes de Musiques Actuelles) joue un rôle crucial. Ces lieux subventionnés par l’État intègrent peu à peu le jazz dans leur programmation, aux côtés des musiques actuelles. Par exemple, des scènes comme Le Triton (Les Lilas) ou Le Périscope (Lyon) défendent cet esprit de découverte et offrent une plateforme essentielle pour les artistes émergents.
Au-delà des salles, des programmes comme le dispositif « Jazz Migration », soutenu par la fédération AJC (Association Jazz Croisé), permettent depuis 2002 d’accompagner les jeunes artistes de jazz, que ce soit avec des aides à la tournée, à la création ou à la promotion. Ce programme a vu éclore des musiciens essentiels de la scène française, comme Emilie Parisien ou Anne Paceo.
Les Conservatoires : entre ouverture et conservatisme
Un autre volet du soutien institutionnel au jazz passe par l’éducation musicale. Les années 1990 voient ainsi émerger des départements jazz dans nombre de conservatoires nationaux et régionaux de musique. Cela constitue une avancée importante : enfin, le jazz entre dans un circuit éducatif traditionnel jusque-là réservé à la musique classique.
Pourtant, tout n’est pas rose. De nombreux musiciens et enseignants pointent du doigt les limites de cette institutionnalisation. Certains dénoncent un danger d’académisation du jazz, qui risquerait de perdre son caractère spontané et expérimental. Une tension persiste donc entre l’idée de faire rayonner le jazz au sein des institutions et celle de préserver son esprit libre et hors normes.